L’affûtage, ou parfois appelé taper, doit préparer l’athlète à donner 100% de ses capacités le jour du trail. Cependant, il ne doit pas oublier que sa forme se construit à l’entrainement. La phase d’affûtage doit surtout permettre d’effacer la fatigue des dernières semaines d’entrainement.
Je vais revenir ci-dessous sur quelques points théoriques qui vous aideront à mieux comprendre le cas pratique que j’exposerai par la suite. J’analyse la phase d’affûtage d’un traileur préparant la Maxi Race.
Lors d’un affûtage, il convient principalement:
- de réduire les lésions musculaire résiduelles.
- d’optimiser les réserves en glycogène musculaire et hépatique.
- d’améliorer les capacités neuro-musculaires (meilleure vitesse de contraction musculaire notamment).
- d’augmenter le niveau de motivation.
- d’être reposé.
- de réduire les marqueurs d’inflammation
Toutes ces points, mis à part la recharge glycogénique, sont réalisés grâce à la diminution de la charge d’entrainement.
Je vous enjoins à lire cet article de Nolio, qui aborde la question de la quantification de la charge d’entrainement et des indices de forme associés.
Retenons trois points:
- Un bon niveau de fitness s’acquiert en cumulant des séances d’entrainement sur le long terme (semaines, mois, années).
- La fatigue est de l’ordre du court terme. C’est la résultante de la charge accumulée lors des derniers jours et dernières semaines.
- En diminuant la charge d’entrainement lors de l’affutage, on souhaite optimiser le niveau de forme qui est la différence entre le fitness et la fatigue. On accepte donc une légère baisse de fitness afin de provoquer une importante baisse de la fatigue pour finalement maximiser son niveau de forme.
Mis à part la durée, les modalités d’affûtage ne varient pas selon le type d’épreuve.
La méta-analyse de Bosquet et al. préconise un affûtage progressif avec une diminution de la charge d’entrainement allant de -60% à -40% de la charge observée à trois semaines de l’épreuve. La fréquence d’entrainement et la distribution des intensités doivent rester les mêmes. Seule la charge diminue.
Ceci est un cadre général, qui doit être adapté selon ses contraintes et ses expériences personnelles. Je préconise de partir de ces recommandations puis d’ajuster au fil des saisons et de ses expériences.
Pour les coureurs sur route, sur un 10 Km par exemple, un affûtage d’une semaine et demi est valable. Pour les ultra traileurs, cette durée peut aller jusqu’à 3 semaines, voir 3 semaines et demi avant l’épreuve.
Un peu de contexte. Ce traileur a terminé la Maxi Race aux environs de la 350ème place. Il a réalisé un dernier bloc d’entrainement (week-end choc) de deux fois 7h afin de reconnaître le parcours à un mois de l’évènement.
Les dernières semaines d’entrainement ont été construites ainsi:
S-5: Charge prévue 1030*, réalisée 1180, 82 Km, 3700 D+ et 1h40 de vélo
S-4: Charge prévue 1300, réalisée 1307, 100Km, 5900 D+ (Semaine de week-end choc)
S-3: Charge prévue 561, réalisée 488, 46Km, 2660 D+
S-2: Charge prévu 410, réalisée 424, 38 Km, 2300 D+
S-1: Charge prévue 155, réalisée 146, 15 Km, 600 D+.
* Charge TRIMP construite à partir du temps passé dans chaque zone d’entrainement, pour un modèle à 5 zones.
J’ai fait le choix de conserver en S-3 60% de la charge d’entrainement de S-5. Je n’ai pas pris S-4 comme référentiel. C’est une semaine particulière car elle inclut deux longues sorties de sept heures. La charge en S-2 est à 40% de S-5. La dernière semaine est une semaine d’ajustement où l’on ajuste les séances selon le ressenti au réveil.
Les préconisations issues de la littérature mentionnent de conserver 60% et 40% de la charge de S-3 en S-2 et S-1. J’ai fait le choix d’anticiper un peu afin de bien digérer les 14 heures réalisées en deux jours.
La distribution des intensités (voir ci-dessous)* nous montre qu’elle est pratiquement la même de S-5 à S-2 malgré l’affûtage. J’ai conservé des séances en côte au dessus du second seuil ainsi que des efforts entre le seuil 1 et le seuil 2, jusqu’à 5 jours avant la course.
* Premier graphique, Temps passé dans chaque zone d'entrainement
* Second graphique, pourcentage du temps passé dans chaque zone, période pré-affutage versus période post-affutage.
Volume horaire d'entrainement et temps passé dans chaque zone
Distribution des zones d'entrainement pré-affûtage versus affûtage
Ceci étant dit, voici ce que montrent les marqueurs de récupération que sont le sommeil, la variabilité de la fréquence cardiaque et la fréquence cardiaque au repos lors des dernières semaines d'entrainement.
La moyenne glissante sur 7 jours de la VFC est en hausse après une chute à la suite du week-end choc. Son niveau basal est de 60, elle est descendue à 53 en lendemain de week-end choc puis elle est remontée à 70 juste avant l’épreuve. Exception faite du matin de la course; avec un départ aux alentours de 3h du matin, la nuit fut très courte.
Le niveau basal de FC de repos est de 42bpm, avec un pic à 50bpm en sortie de week-end choc puis un retour autour de 40bpm en veille de course.
En terme de ressenti de l’effort, aucun n’effort n’est perçu comme étant très difficile durant les dernières semaines, et les retours écrits de l’athlète sont positifs: “Je me sens bien”.
La quantité de sommeil est, elle, restée la même.
La hausse de la VFC, couplée à une baisse de la fréquence cardiaque de repos ainsi qu’une sensation de forme observée par l’athlète sont autant de marqueurs d’un affutage potentiellement réussit.
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